Feather child 4 – Jesmonide, cire et plume (canard et caille) détail
– Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
Feather child 4 – Jesmonide, cire et plume (canard et caille)
– Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
prise de vue de l’exposition A.C Plantey
– Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
En poussant la porte de la galerie Da-End, je découvre l’artiste sculpteur britannique Lucy Glendinning, venue enrichir le cabinet de curiosités qu’est aussi parfois ce lieu insolite.
Cette galerie atypique de Saint Germain des Prés, avec ses alcôves noires ou pourpres offre un écrin feutré aux créatures fragiles de cire, de silicone ou de plumes qui s’y recueillent de façon étrange.
Lucy Glendinning est aussi une femme poète, utilisant l’art comme sémiologie du corps.
« L’art, dans notre contexte historico-culturel, est pour moi une mise en perspective et une prise de conscience de nos responsabilités car il permet d’accroître notre perception de l’humanité. Ceci me semble vital pour se connaître soi même et comprendre la société dans laquelle nous évoluons avec ses disparités grandissantes.
Je veux que l’observateur face à une œuvre devienne conscient de lui-même, comme s’il se voyait en se comparant à l’objet. C’est pour cette raison que j’utilise la figure comme outil. En faisant état d’une situation je cherche à provoquer une forte réaction et renvoyer à chaque individualité jusqu’à ce que chacun se forge sa propre opinion.
Mes œuvres sont réalisées en atelier et sont généralement fabriquées en série. Ces réalisations se développent autours d’une idée qui émerge comme un poème ou un court énoncé. Mes pensées et réflexions proviennent souvent de l’actualité médicale, des études en psychologie, et plus récemment de leurs impacts potentiels sur notre avenir. Ces œuvres sont élaborées à partir d’une approche sculpturale « domestique » et souvent classique dans l’utilisation de la figure comme objet.
Cette production et ces explorations en atelier influencent et façonnent mon travail pérenne à grande échelle. Bien souvent, une œuvre monumentale est d’abord comme le portrait d’un lieu. Ensuite c’est une œuvre qui réagit physiquement avec son environnement et influe sur ses alentours, idéalement en cessant d’être objet, elle va au-delà de sa propre zone d’influence. Ce phénomène est plus perceptible encore dans mes réalisations pour le domaine public, elles sont faites pour incarner l’espace qu’elles occupent, être absorbées, devenir une partie intégrante et cruciale pour l’identité du lieu.
A l’atelier je travaille actuellement sur une série intitulée «Serons-nous capable d’y résister ?» Cette première série est le résultat de mes questionnements sur nos capacités à choisir et à substituer notre patrimoine génétique. Pourrons- nous résister à la tentation de nous perfectionner ? Sauver une personne atteinte d’une maladie génétique est une chose, une chose merveilleuse, mais pourrons-nous résister à la tentation d’aller plus loin ? Cela va-t-il devenir une commodité qui creusera davantage le fossé entre riches et pauvres, non plus d’ordre économique, il sera alors question de disparité entre espèces génétiquement différentes ? En considérant ces notions, j’explore les possibilités d’évolution. A quelles altérations nous poussent nos désirs, à quoi pourraient ressembler nos enfants ? Il est naturel de penser que c’est une mauvaise chose que de chercher à améliorer l’état des bien-portants, mais est-ce si évident?
Sommes-nous fondamentalement responsables de notre évolution ? » Lucy Glendinning, Somerset (GB), Octobre 2012.
Feather child 3 – Jesmonide, cire et plume (faisan)
Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
Dans cette exposition monographique présentée pour la première fois en France (elle travaille principalement en Suède où elle a reçu plusieurs commandes publiques d’envergure), trois aspects de son travail sont donnés à voir.
Le plus impressionnant, à mon sens, étant la vision ses créatures de plumes, semblant dormir délicatement recroquevillées sur elles- même… Petits êtres d’un type nouveau, dessinant clairement les contours et les postures de l’enfant mais couverts d’un matériau inattendu. Elle aborde la question des manipulations génétiques et de ses possibles dérives et hybridations. Elle ne pose un regard ni critique ni approbateur mais le transcende à travers le filtre du poétique, son médium de prédilection.
Nous nous penchons alors, le souffle presque en suspend, plein d’empathie sur ces « petits monstres » adoucis par les traits de l’enfance et la vulnérabilité des positions de sommeil. Ils semblent appeler notre protection, livrés à une désarmante fragilité. Ces sculptures de cire, entièrement recouvertes de plumes se déclinent en plusieurs figures. L’une d’entre elles est assoupie à l’entrée de la galerie, lovée en une petite boule de douceur. Elle est revêtue de sous plume (la partie haute ayant été sectionnée), un duvet mordoré qui renvoie directement au vivant à peine éclos de l’œuf.
Feather child 1 – Jesmonide, cire et plume (canard et caille)
Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
Feather child 1- Jesmonide, cire et plume (canard et faisan)
Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
Une autre sculpture, blanche en plume de canard alternée de marbrure de plume de faisan, offre de jolis détails graphiques au sein de sa matière, notamment un dos travaillé qui signe sa singularité comme sa faillibilité.
Une des plus belles pièces (exposé à Art Paris) est la sculpture du petit être sombre, qui allongé sur le flanc offre au regard le chamarré moiré de son plumage noir.
Sur leur socle, référent à la statuaire classique, devenu refuge à l’endormissement, on s’attendrait à percevoir le mouvement lent et régulier de leur respiration enfantine.
Sa dernière pièce est exposée dans le boudoir haut de la galerie. Un jeune garçon s’est redressé et nous attend, chérubin hypnotique, en une silhouette plus inquiétante, surgissant dans un environnement cramoisi. On peut le contourner et apprécier la beauté qui chamarre plus particulièrement son dos de plumettes mouchetées.
Feather child 2- Jesmonide, cire et plume (faisan et oie) – Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
La plume comme signifiant liant l’humanité à une nature recomposée. La plume pour désigner l’animalité, la plume dont le choix ici renvoie au gibier que l’on chasse… La plume qui exprime l’ambigüité de cette violence sauvage arrachée à la liberté. La plume symbole d’innocence, évocatrice de l’ aile évanescente du séraphin. La plume que Lucy Glendinning prend aussi pour composer ses poèmes…
Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
La figure au féminin d’un corps immaculé, autre versant de son œuvre s’inscrit dans la tradition de la sculpture anglaise. L’artiste met en avant le corps humanisé et non, comme dans la statuaire grecque, la perfection d’un corps idéalisé. Elle se décline sous deux aspects, introspectives ou religieuse.
La question plus personnelle de Lucy Glendinning sur l’identité est représentée par des silhouettes épurées féminines en silicone vernie blanche, dont on ne sait si elles émergent du sol ou fondent sur place…
Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
La série Skin où le contenant paraît comme vidé de sa substance, se plaque au mur…
Il est ici encore question de mutation mais d’une façon allégorique, sa créature se départit de ses oripeaux charnels pour surgir à elle-même.
Corps mutant qui laisse derrière lui les reliquats du passé pour s’ouvrir à une émergence nouvelle. Elle compose un tableau en relief d’un nouveau genre, renvoyant aussi à un trophée de chasse humain déconstruit. Elle pointe et magnifie « l’inquiétant », ce que l’on cache, ce que l’on abandonne.
Skin- Silicone, élastomère, bois.
Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
La dernière partie de son œuvre pose regard ironique sur le poids du religieux qui a baigné son éducation. Elle décide d’y redonner une place significative à la femme. L’enfant Jésus est ici traduit sous les traits iconoclastes d’une petite fille. Une ornementation, évocatrice des broderies des robes d’évêques parcourent directement sa peau, comme une fine branche de lierre fleuri. Sa réplique adulte est également en posture crucifiée au mur, une vision forte et personnelle qui revisite l’éternel thème de la crucifixion. Il suinte de cette vision le gout Iconoclaste de la réappropriation. Son crucifix masculin apparaît morcelé, des membres manquants, cassé … en signe d’un ultime sacrifice ou d’une ultime profanation ?
Des interrogations à parcourir au sein de la galerie Da-End.
Baby Jesus 2 (2012) jesmonite , cire et coton
Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-end
I AM NOT, Exposition du 8 Mars au 25 Avril 2013
Galerie Da‐End, 17 rue Guénégaud 75006 PARIS +33(0)1.43.29.48.64.
maisons-alfort rencontre femmes
montigny-lès-metz site de rencontre juif
Partager la publication "LUCY GLENDINNING – I am not"
Un commentaire sur “LUCY GLENDINNING – I am not”